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Déplorer le comportement d’un salarié dans un courrier, c’est s’interdire de le licencier ultérieurement pour les faits en question

Inquiet du montant croissant des remboursements de frais professionnels, un employeur avait mené l’enquête et découvert un certain nombre d’abus. Un salarié se distinguait des autres, puisque 90 % des excès constatés lui étaient imputables.

L’employeur avait en conséquence modifié, de façon générale, le mode d’indemnisation des « frais de bouche ». En parallèle, il avait adressé au principal auteur de ces abus une lettre dans laquelle il lui expliquait que son attitude avait largement entamé la confiance qu’il lui portait.

Un mois plus tard, l’employeur avait finalement décidé de licencier l’intéressé pour faute grave.

Le licenciement a logiquement été jugé sans cause réelle et sérieuse, au nom du principe selon lequel une même faute ne peut pas être sanctionnée deux fois (cass. soc. 25 juin 1986, n° 84-41606, BC V n° 33 ; cass. soc. 2 juin 2009, n° 07-45314 D). En effet, la lettre de reproches adressée au salarié en amont de la procédure de licenciement s’analysait en un avertissement, donc en une sanction. Il était dès lors impossible de licencier l’intéressé sur la base des faits relatés dans cette lettre.

L’employeur a tenté de faire valoir qu’il s’était borné, par ce courrier, à informer le salarié de sa déception, mais, pour les juges, les termes employés ne laissaient pas de place au doute : il s’agissait d’un avertissement.

Finalement, cet arrêt rappelle une fois de plus que sur le terrain, les dirigeants et services RH doivent se laisser un minimum de temps de réflexion pour choisir la sanction adaptée. Sans quoi un mail de recadrage rédigé à chaud pourrait être assimilé à un avertissement. Auquel cas l’employeur aurait épuisé son pouvoir disciplinaire, ce qui l’empêcherait ensuite de prononcer une sanction plus lourde pour la même faute.

Cass. soc. 3 février 2017, n° 15-11433 D

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